Rompre un contrat d’un commun accord : la rupture conventionnelle

La rupture conventionnelle s’adresse aux parties désireuses de mettre fin à un CDI d’un commun accord. Il présente l’avantage pour le salarié de pouvoir bénéficier de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et des allocations chômage. Pour l’employeur, il s’agit d’un moyen simple, rapide et sécurisé pour mettre fin au contrat de travail. Aucun préavis n’est applicable.

• Champ d’application •

La rupture conventionnelle ne peut pas être utilisée si :

  • le salarié est titulaire d’un CDD,
  • le salarié est titulaire d’un contrat d’apprentissage,
  • le salarié est en période d’essai,
  • la rupture du contrat de travail résulte d’un accord de GPEC,
  • la rupture du contrat de travail s’inscrit dans un plan de sauvegarde de l’emploi,
  • l’employeur n’a pas respecté ses obligations en matière d’élections professionnelles lorsque la consultation du CSE est obligatoire (salariés élus ou assimilés).

Elle est admise si :

  • le contrat de travail du salarié est suspendu, quelle qu’en soit la raison (congé de maternité, accident du travail ou maladie professionnelle, congé parental d’éducation, congé sabbatique, congé sans solde, etc.),
  • l’employeur rencontre des difficultés économiques, à condition que la rupture n’intervienne pas dans le cadre d’un accord de GPEC ou d’un plan de sauvegarde de l’emploi et que la multiplication des ruptures conventionnelles ne constitue pas un détournement de la procédure de licenciement économique,
  • il existe un différend entre les parties, sous réserve que le consentement à la rupture soit donné librement,
  • le salarié a été déclaré inapte à son poste de travail, sans qu’il y ait lieu de chercher à reclasser le salarié au préalable (Cass. soc. 09.05.2019 n°17-28767).

• Conditions •

Le consentement du salarié doit être donné librement

Tel n’est pas le cas si le salarié est induit en erreur ou s’il subit des pressions ou une violence psychologique au moment de la conclusion de la convention de rupture.

Une indemnité spécifique doit être versée au salarié

Le montant de cette indemnité ne peut être inférieure à celui de l’indemnité légale de licenciement ou, pour les employeurs des branches d’activités représentées par le Medef, la CPME ou l’UPA, au montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement.

Si le salarié a moins d’une année d’ancienneté, l’administration préconise de calculer l’indemnité au prorata du nombre de mois de présence. Si la convention collective doit être prise en considération et que celle-ci prévoit 2 montants différents (par exemple, l’un en cas de licenciement personnel, l’autre en cas de licenciement économique), l’administration donne pour instruction de retenir le montant le plus faible, sous réserve que celui-ci soit supérieur ou égal au montant de l’indemnité légale. A ce jour, cette position n’a pas, à notre connaissance, été validée ou invalidée par le juge.

La rupture conventionnelle doit être homologuée par la DREETS

L’homologation administrative est une formalité substantielle sans laquelle la rupture ne peut prendre valablement effet, même avec l’accord exprès des 2 parties. S’il s’agit d’un salarié protégé, la rupture doit être autorisée.

La rupture conventionnelle ne doit pas être utilisée pour contourner des dispositions d’ordre public

Ce mode de rupture ne peut être utilisé pour réduire les effectifs d’une entreprise en contournant les règles qui régissent les licenciements collectifs pour motif économique. Pour ne pas susciter un contrôle approfondi de l’administration, il est préférable de ne pas dépasser les seuils suivants :

  • 9 demandes sur une même période de 30 jours,
  • 0 demande sur une période de 3 mois faisant suite à 10 demandes échelonnées sur la période de 3 mois immédiatement antérieure,
  • 0 demande au cours des 3 premiers mois de l’année faisant suite à plus de 18 demandes au cours de l’année civile précédente.

• Procédure •

La procédure de rupture conventionnelle se déroule en principe selon les étapes suivantes :

  • Convocation du salarié à un premier entretien,
  • Premier entretien,
  • Convocation du salarié à un deuxième entretien,
  • Deuxième entretien – signature du formulaire CERFA et de la convention de rupture,
  • Délai de rétractation de 15 jours calendaires,
  • Envoi de la demande d’homologation,
  • Délai de réponse de l’administration de 15 jours ouvrables,
  • Remise des documents de fin de contrat et sortie du salarié.

Aucun formalisme n’est exigé pour la convocation du salarié. Un seul entretien peut suffire. D’autres entretiens peuvent être organisés en cas de besoin.

Si le salarié bénéficie d’une protection contre le licenciement au titre de l’exercice d’un mandat (membres du CSE, conseillers prud’homaux, etc.), la procédure est la suivante :

  • Convocation du salarié à un premier entretien,
  • Premier entretien,
  • Convocation du comité social et économique*
  • Convocation du salarié à la réunion du comité social et économique*
  • Réunion de consultation du comité social et économique*
  • Convocation du salarié à un deuxième entretien,
  • Deuxième entretien – signature de la convention de rupture et du formulaire CERFA,
  • Délai de rétractation de 15 jours calendaires,
  • Envoi de la demande d’autorisation,
  • Délai de réponse de 2 mois,
  • Remise des documents de fin de contrat et sortie du salarié.

Un seul entretien peut suffire à condition que la convention de rupture soit signée après la réunion de consultation du CSE lorsque celle-ci est obligatoire. D’autres entretiens peuvent être organisés en cas de besoin.

* En cas de rupture du contrat d’un représentant du personnel élu ou assimilé (notamment : délégué du personnel, membre titulaire ou suppléant du comité d’entreprise, représentant syndical au comité d’entreprise, représentant des salariés au CHSCT)

• Délais •

La mise en œuvre d’une procédure de rupture conventionnelle nécessite un délai de 6 à 8 semaines en fonction du nombre et des dates des entretiens préalables. Si le salarié est protégé, il est prudent de compter 2 mois au minimum. Le salarié peut être dispensé de travail pendant toute cette période par accord mutuel des parties.

• Coûts •

La rupture conventionnelle implique :

  • le paiement du salaire jusqu’au jour de la rupture du contrat,
  • le paiement de l’indemnité légale de licenciement ou, pour les employeurs des branches d’activités représentées par le Medef, la CPME ou l’UPA*, le paiement de l’indemnité conventionnelle de licenciement,
  • le paiement d’une indemnité compensatrice de congés payés,
  • le cas échéant, la rémunération de la clause de non-concurrence si elle existe et qu’elle n’est pas levée par l’employeur,
  • le maintien des garanties complémentaires (remboursement des frais de santé et prévoyance).

* Les salariés des professions libérales et des professions agricoles, ceux travaillant pour un particulier-employeur ou dans le domaine sanitaire et social (Circ. DGT n°2009-25 du 08.12.2009), ainsi que les salariés de l’édition (CA Nancy 30.08.2017 n° 16-02668), de l’audiovisuel (Cass. soc. 27.06.2018 n° 17-15948) et les journalistes (Cass. soc. 03.06.2015 n°13-26799) ne peuvent prétendre à l’indemnité conventionnelle.

L’indemnité spécifique de rupture est exonérée de charges sociales dans la limite de 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale à hauteur du plus élevé des 3 montants suivants :

  • montant de l’indemnité prévue par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi ;
  • 2 fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail (préavis inclus, y compris en cas de dispense) ;
  • 50% de l’indemnité versée (CSS art. L242-1 II 7°).

Cette fraction exonérée est soumise à un forfait social de 20%, à la charge de l’employeur. A compter du 1er septembre 2023, le forfait social est remplacé par une contribution de 30%, toujours à la charge de l’employeur.

• Risques •

D’une manière générale, la rupture conventionnelle homologuée est rarement remise en cause par les juridictions, ce qui en fait un moyen sécurisé pour l’employeur de mettre fin au contrat de travail.

Pour invalider une rupture conventionnelle, le salarié doit faire état d’un vice de consentement (ex : erreur, dol, violence physique ou morale) ou le non-respect d’une formalité substantielle (ex : absence d’entretien, défaut de remise d’un exemplaire de la convention au salarié, non-respect du délai de rétractation). S’il y parvient, la convention de rupture peut être jugée comme nulle. Elle produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit au salarié au paiement de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que des dommages et intérêts.

Une simple irrégularité (ex : défaut d’information du salarié, erreur dans la date de rupture) n’entraîne pas la nullité de la convention, sauf à démontrer qu’elle a altéré le consentement du salarié. A défaut de nullité, ce dernier peut éventuellement obtenir des dommages et intérêts s’il démontre que le manquement de l’employeur lui a causé un préjudice distinct.

Particularités
Pour les salariés occupant les fonctions de médecin du travail, la rupture conventionnelle doit être soumise à l’avis du médecin inspecteur du travail avant d’être soumise à l’inspecteur du travail.

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