En cas de manquements graves de l’employeur, le salarié peut saisir le conseil des prud’hommes en demandant au juge de prononcer la rupture du contrat de travail. A la différence de la prise d’acte, la demande de résiliation judiciaire implique la poursuite de la relation contractuelle, sauf évènement postérieur venant rompre le contrat tel qu’une prise d’acte ou un licenciement. Au terme de la procédure, le juge peut soit débouter le salarié, soit prononcer la rupture du contrat dans les conditions d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d’un licenciement nul, selon le statut de l’intéressé ou les manquements constatés.
• Champ d’application •
L’action en résiliation judiciaire peut être intentée par le salarié sous contrat à durée indéterminée en cas d’inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles. Il doit s’agir de manquements suffisamment graves tels que :
- le non-paiement du salaire (Cass. soc. 09.06.2017 n° 16.14020),
- le retrait d’un véhicule de fonction (Cass. soc. 07.03.1996 n° 93-41127),
- la diminution significative des responsabilités du salarié (Cass. soc. 15.09.2016 n° 14-14922),
- le défaut de fourniture du travail (Cass. soc. 31.01.2012 n° 10-26322),
- les manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité (Cass. soc. 08.06.2017 n°16-10458).
La rupture peut également être demandée par le salarié sous contrat à durée déterminée, mais uniquement en cas de faute grave au sens de l’article L1243-1 du Code du travail.
Elle ne peut pas en revanche être demandée par l’employeur, sauf dans le cadre d’un contrat d’apprentissage en cas de faute grave d’un apprenti (C. trav. art. L6222-18).
• Procédure •
L’action en résiliation judiciaire doit être introduite devant le conseil de prud’hommes.
Au cours de la procédure et jusqu’à ce que le Conseil de prud’hommes rende sa décision, le contrat de travail doit être exécuté normalement. L’employeur ne peut en tirer un motif de licenciement (Cass. soc. 07.07.2004 n°02-42821).
La demande de résiliation judiciaire devient sans objet en cas de démission ultérieure du salarié (Cass. soc. 30.04 2014 n°13-10772), rupture conventionnelle (Cass. soc. 10.04.2013 n°11-15651) ou prise d’acte (Cass. soc. 15.03.2006 n°05-41376). A l’inverse, si le salarié est licencié ultérieurement pour d’autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée et c’est seulement dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur (Cass. soc. 16.02.2005 n°02-46649)
• Conséquences •
Si la demande de résiliation judiciaire est rejetée : le juge déboute le salarié. Les relations de travail doivent se poursuivre normalement.
Si les manquements sont jugés suffisamment graves : la rupture est prononcée aux torts de l’employeur.
Le contrat de travail prend fin au jour de la décision judiciaire ou, si le salarié a été licencié pendant la procédure, à la date où le contrat a été rompu (Cass. soc. 15.05.2007 n°04-43663).
Si le contrat de travail contient une clause de non-concurrence, l’employeur peut la lever dans les délais impartis par la clause, étant précisé que le point de départ du délai peut être fixé à la date du jugement (Cass. soc. 06.05.2009 n°07-44692). Dans le cas contraire, l’employeur doit verser l’indemnité compensatrice prévue au contrat de travail.
Si le salarié bénéficie d’une protection contre le licenciement ou si les manquements ont trait à des faits de harcèlement moral ou sexuel, de discrimination ou de violation d’une liberté fondamentale, l’employeur encourt les condamnations applicables en cas de licenciement nul. Dans le cas contraire, les condamnations encourues sont celles applicables en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dans les deux cas, les dommages et intérêts pour licenciement irrégulier ne sont pas applicables.