Licencier le salarié pour absences prolongées ou répétées

L’absence prolongée ou les absences répétées d’un salarié en raison d’une maladie ou d’un accident non-professionnel peut justifier un licenciement lorsque ces absences perturbent le bon fonctionnement de l’entreprise et rendent nécessaire le remplacement définitif du salarié. Ce mode de rupture suppose le paiement de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et de l’indemnité compensatrice de congés payés. Il ouvre également droit au salarié au bénéfice des allocations chômage.

• Champ d’application •

Le licenciement pour absences prolongées ou répétées ne peut pas être notifié :

  • si le contrat de travail du salarié est suspendu en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (C. trav. art. L1226-9) ;
  • pendant la période d’état de grossesse médicalement constatée (à partir du moment où l’employeur en a connaissance), la durée du congé maternité ou d’adoption (même si ce congé n’est pas pris) et les congés payés pris immédiatement après le congé de maternité (C. trav. art. L1225-4) ;
  • pendant les 10 semaines suivant le retour de la mère dans l’entreprise à l’issue d’un congé maternité ou d’adoption ou, le cas échéant, des congés payés qui y ont été accolés, et les 10 semaines suivant la naissance d’un enfant pour le père biologique (C. trav. art. L1225-4 et L1225-4-1) ;
  • si l’employeur n’a pas respecté ses obligations en matière d’élections professionnelles lorsque la consultation du comité social et économique est obligatoire (licenciement d’un salarié élu ou assimilé), sauf s’il justifie de l’impossibilité d’organiser lesdites élections avant de saisir l’inspecteur du travail (Circ. DGT n° 07/2012 du 30 juillet 2012).

• Motifs •

Les absences du salarié doivent être liées à une maladie non-professionnelle

La durée des absences pour maternité ne peut être prise en compte dans le calcul des absences retenues par l’employeur (Cass. soc. 19.02.1991 n° 87-44418). Par extension, il en va de même pour les absences pour cause de maladie professionnelle, d’accident du travail, de congé de paternité ou d’adoption. Si les absences du salarié ne sont pas en tout ou partie justifiées, il peut être préférable d’engager une procédure de licenciement pour faute. Dans ce cas, la procédure disciplinaire doit être respectée.

L’absence du salarié doit perturber le bon fonctionnement de l’entreprise

Il n’existe pas de seuil permettant de déterminer le nombre ou la durée des absences qui caractérisent une perturbation du bon fonctionnement de l’entreprise. Cette condition doit être appréciée in concreto au jour du licenciement. La jurisprudence retient notamment la taille de l’entreprise (Cass. soc. 24.04.1990 n°87-44817), la durée et la fréquence des absences (Cass. soc. 05-10-1999 n°97-41867), la nature des fonctions du salarié (Cass. soc. 06.02.2008 n° 06-45762), l’importance du service dans lequel il travaille (Cass. soc. 23.05.2017 n° 14-11929), la prévisibilité des absences (Cass. soc. 19.10.2017 n° 15-26824), la technicité du poste qui rend impossible le recours au travail temporaire (Cass. soc. 09-10-2013 n°12-15975) ou les conséquences importantes pour l’entreprise (Cass. soc. 16.09.2015 n°14-10844). La notion de désorganisation est appréciée au niveau de l’entreprise et non de l’établissement ou du service dans lequel travaille le salarié (Cass. soc. 23.01.2013 n° 11-28075). Le licenciement du salarié est injustifié lorsque celui-ci a repris le travail (Cass. soc. 06.02.2008 n° 07-40065) ou lorsqu’il est en mesure de le reprendre (Cass. soc. 15.10.1991 n° 88-43678).

L’employeur doit procéder au remplacement définitif du salarié licencié

Le remplacement définitif suppose l’embauche par l’entreprise d’un nouveau salarié en CDI (Cass. soc. 02.03.2005 n° 03-42800). Le remplacement ne peut être opéré en réaffectant un salarié de l’entreprise sur le poste du salarié remplacé (Cass. soc. 04.06-1998 n°96-40308) ou si le remplaçant est embauché par une autre société du groupe (Cass. soc. 25.01.2012 n° 10-26502). Il en va de même si le remplaçant est embauché sous CDD (Cass. soc. 05.06.2001 n°99-42574) ou s’il s’agit d’un intérimaire (Cass. soc. 16.07.1997 n094-43067) ou d’un stagiaire (Cass. soc. 22.10.1996 n°93-44697) ou si l’employeur a recours à un sous-traitant (Cass. 18.10.2007 n°06-44251). A condition que l’employeur engage réellement un nouveau salarié en CDI, un recrutement en cascade peut caractériser un remplacement définitif du salarié absent (Cass. soc. 15.01.2014 n°12-21179).

La durée du travail du salarié nouvellement embauché doit être équivalente à celle du salarié remplacé

L’embauche d’un salarié selon un horaire de 61 heures par mois ne peut justifier le remplacement d’un salarié travaillant à raison de 121 heures par mois (Cass. soc. 06.02.2008 n° 06-44389).

L’embauche du nouveau salarié doit être concomitante à la notification du licenciement

Pour que le licenciement soit justifié, le remplacement définitif doit intervenir soit avant le licenciement, mais à une époque proche de celui-ci (Cass. soc. 16.09.2009 n° 08-41879, M.) ou au jour du licenciement (Cass. soc. 15.02.2011 n° 09-42580) ; soit après le licenciement, dans un délai raisonnable (Cass. soc. 20.02.2008 n° 06-44712).

ATTENTION

Un nombre important de conventions collectives limitent le recours à ce type de licenciement en imposant des restrictions particulières (ex : mise en demeure préalable de l’intéressé de reprendre son travail à une date déterminée, priorité de réembauche etc.) ou en interdisant le remplacement du salarié absent pendant une période déterminée (ex: clause de garantie d’emploi). En cas de non-respect de ces dispositions, le licenciement peut se voir priver de cause réelle et sérieuse.

• Procédure •

Schématiquement, le licenciement pour absences prolongées ou répétées se déroule selon les étapes suivantes

* hors salarié protégé

• Coûts •

CoûtsApplication
Respect du préavis ou paiement d’une indemnité compensatriceoui
Indemnité légale ou conventionnelle de licenciementoui
Indemnité compensatrice de congés payésoui
Rémunération de la clause de non-concurrence (si elle existe)oui
Maintien des garanties complémentaires pendant 12 mois*oui

* pendant une durée égale à la période d’indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail. Les dispositions du contrat de travail et/ou de la convention collective peuvent induire des coûts supplémentaires (clause parachute, indemnité de non-concurrence, etc.).

• Risques •

 Licenciement irrégulier
C. trav. art. L1235-2
Licenciement sans cause réelle et sérieuse
C. trav. art. L1235-3
Licenciement nul
C. trav. art. L1235-3-1
Cas d’applicationNon-respect de la procédureDéfaut de motivation, motif imprécis, non suffisamment sérieux ou dont la réalité n’est pas établieViolation d’une liberté fondamentale, à des faits de harcèlement moral ou sexuel, à un licenciement discriminatoire ou consécutif à une action en justice, en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et en cas de dénonciation de crimes et délits, ou à l’exercice d’un mandat par un salarié protégé, ainsi qu’aux protections applicables en matière de maternité et de paternité et d’accident du travail et de maladie professionnelle.
Possibilité pour le salarié de demander sa réintégrationNONNONOUI
Dommages-intérêts1 mois de salaire maximumDe 1 à 20 mois de salaire maximum en fonction de l’ancienneté du salarié Pour le détail du barème : C. trav. art. L1235-3A défaut de réintégration : au moins égal au salaire des 6 derniers mois Pas de plafonnement

 

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